La préservation du patrimoine avant tout.
Le 13 juillet 2013, un incendie survient dans les combles de l’Hôtel Lambert encore en travaux et fait effondrer la voute du cabinet des bains, joyau du patrimoine français. Très rapidement, des mesures sont prises afin de préserver au maximum les éléments non détruits par le feu. Une première phase de fouille quasi- archéologique a été entreprise par des équipes spécialisées afin de récupérer un maximum d’éléments dans les débris de l’incendie, selon un procédé digne des plus grandes fouilles (quadrillage du sol , récupération des éléments, mise en caisse , etc….) L’objectif étant de récupérer un maximum d’éléments du décor d’origine, jusqu’à des morceaux de moins de 1cm2. S’en suit une phase de nettoyage de tous les débris récupérés, dans l’attente des préconisations des architectes et du laboratoire des Monuments Historiques pour étudier les différentes solutions. En plus du premier nettoyage visant à faire disparaître les suies, une consolidation de la couche picturale de chaque morceau a été effectuée en vue de la préparation du « puzzle » qui s’annonce très long.
Plus de 8500 éléments sont ainsi traités et stockés
La recherche au service du patrimoine.
Appuyé et guidé par le Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques ( LRMH), les équipes mènent une phase de recherche de plusieurs mois nécessaire pour caractériser les différents désordres et essayer de redonner à chaque fragment sa teinte d’origine. Le nettoyage initial a en effet permis de retirer les suies collées sur le vernie, mais la chaleur de l’incendie a également transformé les liants (huile, blanc de plomb…)
Plusieurs procédés de haute technologie sont alors essayés : un test de nettoyage par torche plasma non concluant, un nettoyage au laser réagissant différemment selon les différents pigments… Il faut donc que le procédé retenu puisse répondre à tous les besoins chimiques des différents composants sans dégradation de la couche de peinture d’origine.
Après de multiples essais, c’est finalement l’équipe de restauratrices qui parviendra à établir une recette à base de gel de Pemulen qui répondra à toutes les attentes du LRMH.
Une nouvelle phase de nettoyage de plus de 6 mois démarre alors afin de traiter de l’ensemble des fragments avec ce procédé. En parallèle, un essai de reconstitution est entrepris dans une zone de l’Hôtel Lambert, ou un bac à sable de 8m2 est construit pour recevoir tous les fragments d’un angle de la voute afin de s’assurer de la possibilité de reconstituer la voute et présenter cette solution aux différent décisionnaires
Fort de ces éléments, un accord de l’ensemble des partis est trouvé pour lancer la reconstitution globale de l’œuvre.
Modélisation 3D de la voute Les données 3D collectées avant le sinistre, cumulées aux données prises après le sinistre vont permettre aux équipes de créer un moule à la forme de la voute afin de recoller les 8500 fragments et reconstituer l’œuvre de Le Sueur au plus proche de son état d’origine.
La renaissance du joyau
En Avril 2015, avec un peu d’avance sur « Paris Plage » , les équipes de l’Hôtel Lambert étendent à l’ensemble de la voute, la phase de reconstitution initié sur un premier angle. Un bac à sable de 35m2 et 14 m3 est alors créé afin de mettre à plat et réassembler l’ensemble des fragments, qui représente 75% de la totalité de l’œuvre. Mis en place dans un dépôt spécifique, à l’abris de la lumière, 15 restauratrices vont oeuvrer pendant prêt de 12 mois En parallèle, une modélisation de la voute issue des relevés 3D réalisés avant et après sinistre, permet de réaliser une coque en PMMA translucide qui servira de moule-support pour recoller tous les fragments entre eux suivant la forme originelle du plafond.
Avec les premiers éléments assemblés, et la réapparition dans le sable de l’œuvre de Lesueur, le travail de fourmis entrepris depuis 2 ans porte ses fruits. Il est assuré aujourd’hui que le cabinet des bains va pouvoir renaître de ses cendres.
Article rédigé en collaboration avec Valentin Le Belleguic